Grosse légume rie

Ce titre n’est pas un hommage à la grosse légume Ghosn qui rirait bien qui rirait le dernier !

Mais à ma visite à la Légumerie 53. Une très belle structure qui mélange insertion, alimentation et agriculture en Mayenne.

Au passage, cette visite se déroulait dans le cadre de ce nouveau format qui semble séduire les initiatives pionnières, submergées de gens plus ou moins intéressés souhaitant les rencontrer, les visiter, s’inspirer. Leur bonne idée c’est de transformer des centaines de visites pendant lesquelles ils transfèrent leur expertise gratuitement et pendant ce temps n’ont plus le temps de produire ; en des demi journées organisées pendant lesquelles ils réunissent les gens intéressés, une fois par mois par exemple, leur font un bon déjeuner, une visite des installations et monétisent l’ensemble (35 euros hier). Très bon modèle, c’est très légitime de payer l’expertise accumulée et transmise, et ça permet aussi de rencontrer dans le public des gens qui partagent des projets proches. Hier par exemple, des responsables de cantines scolaires, un patron de jardin de cocagne, un responsable de fonds d’impact, une jeune acheteuse de Carrefour dégoutée qui voulait redonner du sens à sa vie… Tout ce petit monde pensant à monter des légumeries dans la Sarthe, en Ile de France, dans le sud de la France… ! Pour mes lecteurs fidèles, c’était aussi le modèle de La Tricyclerie et je recommande vraiment ce format à ceux d’entre vous qui avaient de belles idées et l’envie de les répliquer.

Pour en revenir à la légumerie 53, les plus pressés peuvent consulter la page facebook (https://www.facebook.com/La-légumerie-53-1648236002057229/timeline/, en se rappelant qu’ils sont meilleures dans la production que dans la communication en ligne).

De mon côté, quelques « lessons learned » :

  • A la naissance du projet il y a ces toujours belles rencontres entre un fonctionnaire du département et une responsable d’entreprise d’insertion. Le « papa » du projet, c’est le responsable des cantines scolaires qui fait à l’occasion d’une ballade en montagne en 2012 le constat largement partagé de la stupidité à cultiver des carottes en mayenne, les envoyer se faire éplucher, acidifier en turquie puis renvoyées dans un collège de Mayenne. Même si le « kilomètre alimentaire » est une notion complexe, il est communément admis qu’en moyenne les fruits et légumes parcourent plus de 2 500km pour rejoindre notre assiette. Dans un dépatement comme la Mayenne a forte densité agricole, c’est une héresie et la première vocation de ce projet c’est bien la volonté de faire vivre une agriculture de proximité. Pas forcément bio, mais « raisonnée » et surtout de proximité
  • Ensuite, il y a l’insertion, et c’est là que Elisabeth de Vuitton, la « maman » intervient. Au moment où le projet naît, elle dirige Génie, une entreprise d’insertion employant quasi exclusivement des hommes pour des services « durs physiquement » d’aménagement d’espaces verts. En Mayenne, la situation de quasi plein emploi attire vers les structures d’insertion des publics très fragilisés, ou migrants. Et Elisabeth souhaite élargir son offre à un public de femmes. L’idée d’une légumerie émerge de cette rencontre
  • S’y greffe bien sur une 3e dimension, l’alimentation des enfants, l’éducation au goût, le contrôle de ce qu’il y a dans les assiettes. De ce point de vue, bien entendu, tout ce qui est proche n’est pas forcément de qualité, mais indéniablement le contrôle est plus facile. Et pour le responsable du département, cuisinier lui aussi, éviter la corvée d’épluchage est un moyen de replacer les cuisiniers au coeur de leur métier, la préparation d’un bon plat !
  • Un point intéressant c’est, même dans un projet né sous de belles étoiles comme celui là, le temps nécessaire à son émergence et sa construction. 3 ans. Et une mécanisation progressive.
  • Aujourd’hui, 70 clients, une douzaine de producteurs, une douzaine de femmes employées, un peu moins de 2 tonnes de légumes coupés, préparés, et livrés aux cantines des collèges, restaurants, epad… du département. Et qui permet de centraliser les commandes de « gros consommateurs » tout en s’assurant d’un approvisionnement de qualité auprès de « petits producteurs » du département