L’ami Rudy, récemment rencontré en Algérie est, à son corps défendant, à l’origine de ce post. D’abord parce qu’il m’a fait découvrir le très fantastique Canva.com, qui me permet dorénavant de doubler le poids de mes mots par le choc d’une vignette que j’espère bien créer à chaque nouvelle publication, égayant cette page et léguant pour la multitude des paroles de sagesse.
Mais, surtout, Rudy m’a traîné en Kabylie le week end dernier. Cette virée a été l’occasion de prendre lien avec 2 expériences d’innovations sociales comme je les aime.
A un bout de la chaîne, Ahmed Ferkane, brillant patron de Revaplast qui, comme tous les brillants patrons, a vécu une vingtaine de vies. Editeur de journal en Belgique, commerçant en Espagne, commercial de tout et partout, cet homme a une rage de réussir et de vendre qui force le respect. La chance a voulu qu’il la mette au service d’un projet dans sa région d’origine, près de Akbou, et qu’il se mette en tête de traiter le plastique. Son outil de production (une belle presse belge, un convoyeur et 26 salariés) lui permettent de trier, broyer, laver, séchet et mettre en balle 3 tonnes de plastiques issus d’ordures ménagères par jour. Il semble capable, avec la marge générée sur la revente des granules plastiques aux industriels alentours d’entretenir une flotte de véhicules de collecte passant chaque semaine dans la cinquantaine de villages dotés de points d’apport volontaire. Tout ça dans un impressionnant rayon d’une centaine de kilomètres. Le modèle repose sur le talent commercial de Ahmed et sur une dose non négligeable de bénévolat apporté par l’entreprise et ses partenaires associatifs.
Notons au passage que le modèle est entièrement privé, sans subvention ni d’investissement ni d’équilibre. S’il n’en a pas les contours juridiques, les flux d’argent, d’énergie et de temps générés par ce projet ont la saveur du social et du solidaire. A partir de ce socle, Ahmed a des projets plus « massifs » couvrant toute la région et élargissant les flux acceptés.
Une vertu de ce type de centre c’est qu’il libère également des initiatives associatives, non rentables quasiment par construction, à l’autre bout de la chaîne. Par exemple d’Arc en Ciel, un très beau projet d’universitaires de Tizi Ouzou. Leur talent à eux, c’est la citoyenneté. Implication de la (très influente et appréciée) équipe de football régionale, campagnes de ramassage des déchets (on ne peut construire quelque chose que sur un terrain « propre », dans tous les sens du terme), chartes de citoyenneté signées avec les habitants de 700 comités de village… Arc en Ciel ne manque ni de créativité ni de volontarisme. Là aussi, c’est le bénévolat et quelques rares subventions (à noter tout de même celle bienvenue de l’Ambassade de France pour une video de sensibilisation au tri sélectif) qui apportent l’essentiel des ressources. Mais, ne serait ce que symboliquement, la revente de déchets collectés à des entrepreneurs comme Revaplast (ou son équivalent Aluverplast) fait sens, donne de la « circularité » au déchet lui même (qui se transforme en une nouvelle bouteille, un tuyau d’arrosage, une chaise en plastique…) et à la ressource financière collectée.
Deux maillons d’une chaîne, qui démarre ne l’oublions pas nécessairement par des efforts individuels de chacun (comme on le dit en général joliment « shit in = shit out », autrement dit impossible de gérer proprement des déchets non triés à la source) et qui suppose un Etat qui encadre, fixe des règles et incite par la tarification, la communication et l’organisation des conditions de l’offre, tout un chacun à réduire et trier ses déchets.
Et pour boucler la boucle, allez donc faire un tour sur La compagnie générale des autres (http://lacompagniegeneraledesautres.co), 2e prix du meilleur titre de blog, après gazdeshit !!