Tiberine, automne 2019

(à écouter avec Moon, de Eerie Wanda, qui m’accompagne aussi dans mes méditatives sorties en vélo le long de la Mayenne !)

Ceux qui me connaissent savent que les deux flux dans lesquels je crois sont ceux du prêt d’honneur et des déchets organiques. Pas tellement et pas assez peut être dans ceux de la spiritualité.

J’ai pourtant le privilège de cotoyer au long de ma mission algérienne Benoit, qui nous a conduit, avec les très agréables compagnons de voyage Patrick et Anne Sophie au monastère de Tibérine. Celui là même qui vit 7 moines décapités pendant les années noires algériennes et dont l’extraordinaire « Des hommes et des dieux » rend compte de la charge émotionnelle. 2 moines et 2 soeurs y vivent aujourd’hui et y accueillent régulièrement pélerins ou importuns, musulmans pour la plupart, heureux de faire vivre l’héritage de Père Christian, dont le très émouvant testament peut être lu ici ou vu en clôture du film de Xavier Beauvois.

Au delà du calme et de la beauté de l’endroit, j’ai eu ce week end, à la contemplation du très simple aménagement des tombes, à la tranquillité de la célébration, à la paisible joie de faire une tarte aux figues avec soeur Brigitte, à l’agréable promenade dans le verger et le potager… une indiscible impression que le monde était simple et facile ! L’une des soeurs s’attèle à rendre tout ça « bio », une deuxième soeur arrive pour permaculturer l’ensemble et quelques ruches tentent de produire un peu de miel.

Oui, vraiment, c’est bien ce que je mets personnellement derrière ce mot un peu galvaudé de permaculture. Pas tellement des buttes ou des planches, mais plutôt ce sentiment d’évidence et de simplicité, de temps laissé au temps (les mecs, pardon les moines, ont tout de même un engagement de stabilité… à vie), d’espace laissé aux gens pour prendre leur place, d’intervention minimum, de culture du sol qui porte plutôt que de la plante, qui n’est pas sans me rappeler la célèbre théorie du « doigt occulte » du mécréant mais visionnaire Jean Michel ou la vie choisie par les Racines du Ciel au Liban par exemple. Les choix économiques d’un magasin comme au Local, également. C’est peut être à ce prix qu’on trouvera les alternatives. C’est en tout cas dans ces univers qu’elles s’épanouissent en douceur et en évidence.

Une pensée, également pour relier mes deux flux préférés. L’argent, c’est comme l’engrais. A trop en mettre, a trop chercher l’accélération, on va dans le mur, on crée des bulles qui passent « à côté » des clients. A couvrir l’entrepreneur de confiance, à le laisser grandir sans l’étouffer, en fertilisant l’écosystème, le territoire, on favorise des dynamiques durables. Ce qui n’empêche pas, dans cet espace, de viser la plus grande productivité et efficacité possible. Et si c’était dans la manière de faire grandir les boites, dans le rythme, qu’il fallait qu’on cherche, autant que dans l’impact ou la gouvernance ? Une pensée supplémentaire pour un permabusiness !

Y’a de l’espoir et vraiment, rares lecteurs, je nous en conjure, Keep it Simple !